Dix ans après le Dieselgate, une étude chiffre, pour la première fois, le coût humain du scandale des moteurs diesel truqués. Près de 16 000 personnes seraient mortes en France entre 2009 et 2024 à cause de ces émissions occultes. L’enquête ajoute qu’on pourrait éviter 8 000 décès supplémentaires d’ici 2040 si les derniers moteurs frauduleux étaient retirés rapidement.
Dix ans après le scandale du « Dieselgate », une étude inédite, publiée le mardi 27 mai, établit le coût humain des moteurs diesel truqués. Cette enquête est celle du Centre for Research on Energy and Clean Air (CREA), un institut de recherche finlandais. Elle affirme qu’en France, les moteurs frauduleux ont provoqué 16 000 décès entre 2009 et 2024.
Le Dieselgate n’a pas fini de faire des malheurs
Le CREA note également que 8 000 morts supplémentaires pourraient être évités d’ici 2040, si les derniers moteurs frauduleux étaient retirés rapidement. On estime aujourd’hui que trois milliards de voitures aux moteurs truqués sont toujours en circulation. A l’échelle européenne (y compris avec le Royaume-Uni), il pourrait y avoir plus de 205 000 décès prématurés supplémentaires entre d’ici 2040, prévient l’étude finlandaise. Dans cette fourchette temporelle, les surémissions pourraient engendrer 2,4 millions de jours d’arrêt maladie, avec un impact direct sur les finances publiques.
Des pertes économiques s’ajoutent au coût humain
Déjà, le CREA estime que 26 000 cas d’asthme en plus auraient été provoqués par les moteurs truqués en trente ans. L’institut évoque également la pollution liée aux NOx qui contribue à des maladies respiratoires, cardiovasculaires et à des cancers. Il chiffre à 146 milliards d’euros le coût économique total du Dieselgate pour la France. Cette somme inclut les soins médicaux, les pertes de productivité et les décès prématurés. Au niveau européen, les pertes économiques s’élèveraient à 1 200 milliards d’euros.
Le Dieselgate a éclaté en 2015
Pour parvenir à ces estimations inédites, les chercheurs finlandais ont calculé l’impact sur la qualité de l’air des émissions excédentaires de gaz toxiques et d’oxydes d’azote (NOx) produits par les voitures suspectées d’utiliser des dispositifs interdits. Dix ans après le scandale industriel du Dieselgate, cette enquête dévoile l’ampleur sanitaire de cette affaire. Celle-ci a éclaté en septembre 2015, quand l’Agence américaine pour l’Environnement a accusé Volkswagen de fausser les contrôles sur les émissions d’oxyde d’azote.
Les véhicules équipés de dispositifs de manipulation des tests en laboratoire
Plus de 200 modèles de voitures seraient concernés par ce truquage. Ces véhicules sont équipés de dispositifs d’invalidation qui manipulent les résultats des tests d’émissions en laboratoire. Une fois en conditions réelles (sur route), ces émissions peuvent atteindre des niveaux jusqu’à 20 fois supérieurs aux normes légales. Vendus entre septembre 2009 et août 2019, les modèles concernés relevaient des normes Euro 5 et Euro 6. Aujourd’hui, il existe le test RDE (Real Driving Emissions), censé évaluer les émissions en situation de conduite réelle.
Le Dieselgate a fait tomber des têtes en Allemagne, pas en France
En France, une information judiciaire a été ouverte en janvier 2017 contre PSA, Renault et Fiat Chrysler, qui ont tous été mis en examen. Mais aucune sanction n’a été prononcée à ce jour à leur encontre. En Allemagne, en revanche, où le patron de Volkswagen a démissionné en 2015, l’ancien PDG d’Audi a été condamné en 2023 après avoir reconnu la fraude. Deux autres haut responsables ont été condamnés cette semaine. Pour les ONG environnementales, l’État français se rend complice du crime en protégeant les constructeurs automobiles. « L’État a des morts sur les mains […} Il faut qu’il impose la remise aux normes des véhicules », affirme Anne Lassman-Trappier de France Nature Environnement.