Hexane : du pétrole dans nos assiettes ?

La Cellule investigation de Radio France a récemment obtenu des analyses montrant la présence de résidus d’hexane dans plusieurs échantillons alimentaires. Sur 54 produits testés, par le centre commun de mesures de l’université de la Côte d’Opale à Dunkerque et un autre laboratoire privé, 25 contenaient des traces de ce produit dérivé des hydrocarbures. Pourtant, ce solvant chimique est indexé depuis plusieurs années pour ses effets potentiels sur la santé.

Alors que plusieurs études et rapports soupçonnaient déjà l’hexane d’être dangereux pour la santé humaine, la Cellule investigation de Radio France met une pierre sur le dossier. Elle a récemment obtenu des analyses montrant la présence de résidus de ce solvant chimique dans plusieurs échantillons alimentaires. Sur 54 portions testées, par le centre commun de mesures de l’université de la Côte d’Opale à Dunkerque et un autre laboratoire privé, 25 contenaient des traces de cette substance. On l’a retrouvée notamment dans des œufs, du beurre et de l’huile.

L’hexane, un dérivé du pétrole qui aspire le gras

Pour rappel, l’hexane est un mélange d’hydrocarbures dérivé du pétrole. Connu pour attirer le gras, ce produit est utilisé par l’industrie agroalimentaire pour extraire les huiles végétales de graines comme le soja, le colza ou le tournesol. Les triturateurs -ceux qui procèdent à l’extraction- obtiennent par la suite des tourteaux déshuilés, ces parties solides servant à l’alimentation du bétail. Cette pratique a été instaurée aux Etats-Unis dans les années 30.

Parmi une liste de potentiels perturbateurs endocriniens

Outre la production de tourteaux déshuilés pour les animaux, l’hexane entre dans la composition de produits de consommation courante tels que les margarines, les laits infantiles et le beurre de cacao. Pourtant, selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), cette substance peut provoquer des irritations cutanées, des troubles neurologiques et des effets graves sur la fertilité. Par ailleurs, l’Anses avertit que sa principale molécule, le « n-hexane », fait partie d’une liste de potentiels perturbateurs endocriniens. En 2014, l’agence a publié un rapport sur le profil toxicologique de ce composé, rappelant son caractère neurotoxique et reprotoxique (agissant sur le système nerveux et la fertilité).

L’hexane reste autorisé à ce jour

Bien que plusieurs autres alertes aient été lancées, l’hexane reste autorisé à ce jour. Depuis 1996 et un avis de l’ancêtre de l’EFSA, le Comité scientifique sur l’alimentation, l’industrie peut atteindre la limite de 1mg/kg d’hexane dans l’huile. D’après les données recueillies par la Cellule investigation de Radio France, les laboratoires ont pu quantifier des traces allant de 0,01 à 0,4 mg/kg. Mais ces seuils sont trompeurs car les chercheurs ont mis au point des méthodes d’analyse permettant de descendre bien en dessous de la limite réglementaire fixée il y a trente ans.

Pourquoi ne pas avertir les consommateurs ?

Dorothée Dewaele, ingénieur de mesures au laboratoire de l’université de la Côte d’Opale, précise d’ailleurs que « la valeur limite légale n’est pas la valeur limite analytique ». Si c’était le cas, ajoute t-elle, on n’aurait jamais trouvé les molécules à la mode comme les polluants éternels. En effet, certains polluants comme les PFAS ou les résidus de pesticides sont détectés dans l’eau ou les aliments à des niveaux 1000 fois plus faibles que l’hexane. En attendant que les autorités décident d’interdire ce solvant ou d’abaisser davantage les taux, certains appellent les industriels à avertir les consommateurs de sa présence dans leurs produits.

Les agroindustriels n’ont pas à signaler la présence de l’hexane sur les emballages

Malheureusement, l’hexane, comme d’autres produits chimiques utilisés dans l’alimentation, bénéficie d’une législation particulière. Il appartient à la classe des auxiliaires technologiques, qui n’ont pas besoin d’être déclarés, à l’inverse des additifs. Ainsi, les industriels n’ont pas à préciser sur l’étiquette sa présence dans un produit fini, comme il ne s’agit pas d’un ingrédient. Ils assurent également être toujours en dessous de la limite règlementaire dans tous les tests effectués par des laboratoires indépendants.

Il existe des alternatives à l’hexane

En dépit de ces justifications, la présence de l’hexane dans les produits alimentaires à l’insu des consommateurs préoccupent beaucoup. Certains élus s’activent pour faire évoluer la réglementation. Comme le député MoDem du Loiret Richard Ramos, qui a déposé une proposition de loi en mars 2025 en vue d’interdire la commercialisation de produits alimentaires contenant cette substance. D’autres voix appellent les industriels à privilégier des alternatives saines comme le solvant biosourcé.

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