Sur la plage de Pampelonne, le tout Palace comme perspective

Coup de balai sur la plage de Pampelonne. Un gros tiers des établissements installés sur ce banc de sable de 4,5 kilomètres, bien connu de la jet-set internationale et des habitués de Saint-Tropez, n’ont pas vu leurs baux reconduits. En lieu et place de certains, Roland Bruno, Maire de Ramatuelle et son Conseil Municipal ont accordé des concessions aux principaux palaces tropéziens. Une affaire de gros sous, qui pose de sérieuses questions sur l’avenir de la plage.

L’Esquinade, le Club 55 (pour la partie sise sur le domaine public),La Plage des Jumeaux, Bagatelle. Autant d’établissements mythiques de l’histoire de Saint-Tropez qui vont être rasés à la fin de l’été. Certains pour mieux reconstruire, les autres pour laisser place à de nouveaux restaurants de plage, pour beaucoup affiliés aux grands palaces tropéziens, ou à des groupes de professionnels de la restauration de luxe de la capitale.

Un big-bang périlleux pour la mairie de Ramatuelle, et même pour l’attractivité de Saint-Tropez : ces restaurants les pieds dans l’eau, lieux festifs privilégiés des peoples, constituent le produit d’appel et une valeur ajoutée majeure de la destination presqu’île de Saint-Tropez… et la seule chance pour Ramatuelle d’exister un jour sur la carte au même titre que sa voisine et rivale ! C’est raté, aujourd’hui son plus bel atout va servir de page de publicité géante aux hôtels de Saint-Tropez.

C’est le long de la plage de Pampelonne, à quelques encablures du lieu d’amarrage de leurs yachts, que les people et les jet-setteurs du monde entier viennent profiter du soleil provençal dans une atmosphère festive, fruit d’une tradition qui remonte aux années 1960, et au contact d’un public aussi divers qu’initié. Une mixité des publics, savamment entretenue et dosée, qui fait le charme et la spécificité de Ramatuelle et de la prequ’île de Saint-Tropez.

Les experts de cette science, voire de cet art, ce sont les exploitants eux-mêmes ! Tous ont apporté leur génie et leur culture propres. La diversité de style, de génération, de clientèle… Pampelonne est, pour quelques jours encore, un exemple que le monde entier envie à la France et à la Commune de Ramatuelle, et que la France et Ramatuelle viennent de décider de sacrifier.

Pourquoi alors changer une recette qui marche ? Pourquoi prendre le risque d’altérer l’image de marque de la presqu’île de Saint-Tropez  et de Ramatuelle?  Parce que le mal français frappe encore sous l’ère d’un Président qui avait pourtant promis de nous en débarrasser… il faut toujours détruire ce qui marche, il faut encore confondre abolir certains privilèges et anéantir le moindre succès.

Un second élément de réponse tient également dans la rude concurrence que se livrent les divers palaces tropéziens pour attirer la clientèle fortunée du monde entier. Fin juillet en semaine, il est encore possible de trouver des chambres dans la plupart d’entre eux. Dans ce combat à mort pour accroître les taux de remplissage, un accès à la plage de Pampelonne est un atout de poids. Et les concessions sur la plage de formidables vitrines.

Une logique qui se tient, mais qui est à double-tranchant. Qui pourrait même à termes remettre en cause l’attractivité de Pampelonne. D’abord parce que les clients les plus attractifs (et donc les plus dépensiers) pour les hôteliers ne sauraient se contenter d’un simple accès à la plage. Ils veulent faire la fête et être vus dans les établissements les plus populaires de la plage ou au contraire dans ceux les plus discrets et authentiques. Une attractivité qui ne se décrète pas et qui requiert un savoir-faire, de la personnalité, du caractère,… et du temps.

Tout aussi problématique d’un point de vue légal et réglementaire, les concessions de plage relèvent d’une délégation de service public. Les restaurateurs qui s’y installent doivent jouer le jeu de l’accueil au public le plus large possible, et ce sans discrimination. Dans cette optique, on imagine mal les palaces tropéziens faire des pieds et des mains pour accueillir un public familial qui se trouve aujourd’hui largement intégré au système de Pampelonne…

Résultats prévisibles : des plages à moitié-vide, des tarifs prohibitifs qui ferment de facto l’accès à Pampelonne au commun des mortels, et une attractivité déclinante de la plage. Pas les meilleurs atouts pour attirer les people face aux autres capitales mondiales de la fête estivale, qui ont au moins, si ce n’est le bon goût, du moins l’opportunisme de prétendre accueillir tout un chacun.

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