Mali : les enseignements de l’élection présidentielle

Le deuxième tour de l’élection présidentielle malienne s’est tenu dimanche. Les résultats sont attendus dans les prochains jours mais, sauf surprise, le président sortant Ibrahim Boubacar Keïta devrait être réélu au terme d’un scrutin marqué par des fraudes massives et une abstention record.

La réélection annoncée d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) pour un second mandat est inquiétante à bien des égards pour le Mali. Le bilan du président sortant est maigre entre son incapacité à juguler la menace terroriste dans le nord et le centre du pays et les multiples scandales politico-financiers auxquels lui et ses proches ont été mêlés au cours des cinq dernières années.

Son impopularité n’aurait pas dû l’autoriser à se faire réélire… mais la politique africaine a parfois ses raisons que la raison ignore. Surtout quand on dispose des moyens de l’Etat pour faire campagne et pour contrôler l’ensemble du processus électoral. Car le scrutin de 2018 aura été marqué comme jamais dans l’histoire malienne par des accusations de fraudes de la part de l’opposition.

Bourrages d’urnes, urnes retirées des bureaux de vote, faux électeurs,… La litanie des accusations des membres de l’opposition et des observateurs internationaux est longue comme le bras. De quoi fragiliser un peu plus un président mal réélu dont la victoire et la légitimé resteront entachées de lourds soupçons de fraudes.

Autre enseignement clé de ce scrutin : l’incapacité de Soumaïla Cissé, considéré avant le scrutin comme le favori de l’élection, à mobiliser au-delà de son camp et à incarner l’espoir du changement et de l’alternance aux yeux de l’opinion publique malienne. Son faible score au premier tour l’a quasi-condamné à n’être qu’un observateur sans réelle chance de remporter la victoire finale.

Soumaïla Cissé, comme IBK d’ailleurs, est sans doute en bout de course politique. Septuagénaires, les deux hommes ont sans doute livré leur dernière joute électorale. Le scrutin de 2018 marque sans doute la fin d’une ère, celle d’une génération qui a accédé au pouvoir au début des années 1990, sans jamais chercher à passer la main aux générations suivantes.

Le dernier enseignement de ce scrutin est un frémissement et un souffle d’optimisme pour la suite porté par la candidature de l’entrepreneur Aliou Diallo. Inconnu du grand-public il y a encore six mois, le fondateur de Wassoul’Or est parvenu à s’imposer comme le troisième homme du scrutin et a animé la campagne électorale par ses propositions fortes et sa volonté de faire de la politique autrement.

Aliou Diallo a pris rendez-vous avec l’avenir au cours des semaines écoulées. La tonalité de sa candidature pourrait donner des idées à toute une jeunesse qui s’est aujourd’hui détournée de la politique et des luttes stériles d’appareil. Avec un IBK démonétisé et une opposition à réinventer, le champ des possibles semble vaste.

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