Les petites entreprises — aussi — victimes du démarchage abusif

Si les particuliers en sont souvent les premières victimes, le démarchage abusif touche aussi les petites entreprises qui, elles aussi, sont la proie de vendeurs peu scrupuleux. Là encore, les fournisseurs d’énergie sont particulièrement visés, mais ces approches commerciales abusives se concentrent surtout sur la mise en conformité des entreprises avec les nouvelles législations, nationales ou européennes.

Les nouvelles réglementations encouragent les méthodes de vente abusives

En France, les nouvelles réglementations sont récurrentes et obligent les entreprises à se mettre rapidement en conformité avec celles-ci. Une aubaine pour les démarcheurs. Depuis 2015, par exemple, l’ensemble des établissements recevant du public (ERP) doit ainsi être en capacité d’accueillir, dans les meilleures conditions possibles, les personnes en situation de handicap. Au vu de la complexité des travaux à effectuer, certains établissements disposent d’un agenda d’accessibilité programmée (ADAP), permettant d’étaler sur plusieurs années leur réalisation.

Problème : certaines entreprises n’hésitent pas à abuser de ces dispositifs. Se faisant souvent passer pour des organismes publics ou prétendant agir en leur nom, ces dernières cherchent à imposer leurs services en menaçant les établissements visés d’écoper de lourdes amendes, s’ils ne se mettent pas en conformité dans les délais les plus brefs. Souvent, le démarchage abusif se transforme en approche agressive.

Invités à fournir leurs coordonnées bancaires, les établissements visés se voient ensuite prélever des sommes très largement supérieures à celles annoncées lors des prises de contact. Dans les départements, préfectures, chambres de commerce et d’industrie ou encore services de police et de gendarmerie multiplient les campagnes de communication pour sensibiliser les professionnels à ces méthodes. S’il n’est plus possible de déposer un agenda d’accessibilité programmée depuis le 31 mars dernier, les abus continuent.

Plus récemment, c’est le Règlement général sur la protection des données (RGPD) qui a aiguisé l’appétit des démarcheurs les moins scrupuleux. Entrée en vigueur le 25 mai 2018, le RGPD oblige les entreprises à se mettre en conformité avec la nouvelle réglementation européenne afin de garantir la protection des données personnelles de leurs collaborateurs, mais aussi de leurs clients.

Dans la Manche, une chef d’entreprise a ainsi révélé avoir été approchée par une entreprise munie d’une lettre provenant prétendument d’un organisme officiel. Là encore, les coupables ont menacé l’entreprise de sanctions financières, si la mise en conformité n’était pas réalisée sous peu : « on peut vous aider à respecter la loi, avec une mise à jour tous les six mois, cela ne vous coûtera que 1 000 euros », aurait ainsi expliqué la société à la victime, ingénieure de formation et dirigeante d’un petit cabinet de conseil en médiation. Même les policiers, pourtant acculturés à ce type d’abus, ignoraient cette nouvelle forme de démarchage. « Au commissariat, on m’a dit que c’est une première, que d’habitude les arnaques portaient plutôt sur les mises aux normes pour handicapés », explique-t-elle.

Des petites entreprises ciblées

Mais, à l’instar des particuliers, les entreprises sont également victimes d’abus dans le secteur de l’énergie. En effet, comme le révèle le médiateur de l’énergie dans son rapport d’activité 2018, « les petites entreprises n’échappent pas davantage aux fausses promesses des démarcheurs. Ces derniers présentent des offres permettant une baisse substantielle des factures, mais ils passent sous silence les conditions de changement de fournisseur ». Et, pour les victimes, la situation est bien souvent plus délicate. En effet, comme le précise le médiateur de l’énergie, « (les entreprises) ne disposent pas d’un droit de rétraction, sauf exception pour les entités de moins de 5 salariés ». Pour rappel, les particuliers bénéficient d’un délai de 14 jours pour renoncer à leur engagement.

Pour ce qui est des particuliers, le nombre de litiges est particulièrement élevé. En effet, 1 416 litiges ont été recensés en 2018 et ce chiffre devrait encore augmenter en 2019. Parmi les entreprises les plus visées, les géants de l’électricité Engie et ENI. Le premier a été condamné en septembre dernier par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) à une amende de presque 900 000 euros pour manquements aux « obligations réglementaires visant à protéger les consommateurs dans le cadre d’un démarchage téléphonique ».

En mars dernier, Engie avait déjà été condamné à verser un million d’euros de dommages et intérêts à EDF, pour concurrence déloyale : l’énergéticien a en effet été reconnu coupable de démarchage abusif, les commerciaux de celui-ci allant jusqu’à usurper le nom d’EDF. « Vous avez, ici, l’exemple d’un mastodonte de l’énergie condamné à deux reprises pour avoir bafoué les règles commerciales les plus élémentaires », dénonce Dimitri Houbron, député du Nord.

En 2018, 56 % des Français auraient ainsi été démarchés dans le domaine de l’énergie, alors qu’ils n’étaient que 36 % en 2017. Les associations de consommateur, comme certains élus, réclament plus que jamais un encadrement plus strict du démarchage et un environnement réglementaire plus contraignant. Pour faire face à ces problématiques, Dimitri Hubon préconise par exemple « d’interdire la rémunération totale des démarcheurs à la commission », principal facteur d’abus, selon l’élu.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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